lundi 1 février 2010
Angoulême 2010 : où Vehlmann fait preuve d'un fair-play remarquable.
Ca y est le palmarès est établi, et il est rempli de bons albums.
Parmi ceux que j'ai eu la chance de lire en 2009 : l'excellente intégrale de "Messire Guillaume", de mes compères Gwen De Bonneval et Matthieu Bonhomme. Une quête initiatique toute en subtilité, balançant entre un moyen-âge réaliste et son pendant imaginaire rempli d'un bestiaire de légende. Un très très beau voyage.
Le brillant "Rebetiko", de ce gros surdoué de Prudhomme (dont j'adore le travail depuis "Ninon secrète"). Une grosse claque graphique et narrative.
Le génial "Alpha direction" de jens Harder, que j'avais découvert lors du festival d'Angoulême 2009, et qui m'a incroyablement marqué. L'Histoire de l'Univers, racontée depuis le Big-Bang, rien que ça, entremêlant imagerie scientifique (parfois étonnamment poétique) et iconographie mythologique ou historique. Un livre inépuisable, qu'on peut lire et relire sans fin.
Le vraiment très drôle "Pascal Brutal" de Riad Sattouf. Une des rares BD qui me fasse vraiment marrer (peut-être parce que je suis très très difficile ?)
Et l'excellente série "Jérôme K Jérôme", de Alain Dodier, dont j'apprécie et connais le travail depuis ses débuts dans "Spirou", où il a aussi animé le personnage dépressif et comique de Gully pour mon plus grand bonheur. Alain qui m'a d'ailleurs toujours dit que s'il devait un jour faire un film sur Jérôme, c'est à moi qu'il demanderait d'interpréter le rôle titre, non pas pour mes talents de comédien (à peu près inexistants) mais bien parce que j'ai la même tronche et le même caractère lunatique que son héros. Je ne sais toujours pas exactement comment je dois le prendre.
Rien pour "Jolies ténèbres", mais c'est la vie...
L'essentiel, c'est d'avoir une sélection finale d'une réelle qualité.
Ca, c'était hier.
Puis je me réveille cette nuit à 3 heures, en me disant que c'est précisément parce que c'est une sélection d'une réelle qualité qu'il m'apparait soudain totalement absurde de ne pas en faire parti.
Moi qui avais en plus préparé une petit discours de circonstance, exprès pour l'occasion, ce que d'autres auteurs moins respectueux du protocole n'ont même pas fait lors de la célébration de la veille (ainsi Gwen de Bonneval ou Matthieu Bonhomme, pour ne citer que les cas d'improvisation les plus flagrants).
Soudain pris de vertige devant l'injustice frappante de ce palmarès, je ne parviens finalement à me rendormir qu'après m'être fait la promesse de mettre en ligne le discours sus-nommé sur ce blog.
Je vous le livre donc en toute modestie, tel qu'il était soigneusement imprimé sur un papier A5 et glissé dans une poche de ma veste relativement facile d'accès :
"Je... C'est une telle surprise !
Je ne m'y attendais vraiment pas"
(une pause, prendre le temps de regarder le public - puis reprendre en articulant bien).
""Jolies ténèbres" en effet, n'est pas de ces livres qu'on pourrait qualifier de faciles d'accès. Il s'adresse même au contraire à un public exigeant, un public rare, à la fois audacieux et clairvoyant"
(ici se tourner vers Blutch avec un sourire timide)
"Je remercie donc sincèrement le jury, pour la pertinence et le réel courage de son choix."
(reprendre son souffle de manière touchante et presque comique, afin de provoquer les rires de l'assistance)
Holala (rire un peu moi aussi, au diapason de la foule désormais conquise).
Je remercie aussi mon éditeur, mes amis et ma famille.
(nouvelle pause, plus courte, puis reprendre avec conviction :)
Quel jour merveilleux. C'est vraiment un immense cadeau que me fait ici toute la profession.
Merci à tous.
Où dois-je poser pour les photos ? Ah d'accord."